L'élaboration du rhum
Culture de la canne :
Il en existe une multitude de variétés, bien que soient souvent mises en avant la canne bleue ou rouge, tant dans la production de rhum blanc ou vieilli.
Son nom latin est Saccharum dont le cultivar Officinarum est reconnu comme souche de base dans la production de sucre. Aujourd’hui pour des besoins en volume et en résistance, que ce soit au climat ou aux nuisibles, les producteurs travaillent des variétés issues de la recherche, ce que l’on nomme des hybrides.
Mais quel que soit sa variété, la canne à sucre a un besoin important en eau, pour autant son pied ne peut être noyé trop longtemps. Sa culture requière un bon drainage, ou une exposition sur un terrain en pente, quelle supporte très bien grâce à un encrage robuste par ses nombreuses racines. Sa reproduction est réalisée sur base de bouturage. Ces ‘morceaux’ de cannes sont plantés à un angle de plus ou moins 45°, ou à plat, ce qui rappelle en effet une technique relativement proche de celle employée pour la vigne, avec des proportions en taille bien différentes.
Elle devra faire face à de nombreux facteurs lors de sa croissance, ce qui est un cas commun à toutes cultures. Insectes, bactéries, virus, champignons, qui répondent aux doux noms de coléoptères, lépidoptères, mildiou etc…
Récolte :
Entre dix mois à un an et demi après la plantation, vient l’heure de la récolte. Elle s’effectue lorsque la concentration en sucre est à son meilleur niveau. Ce taux est calculé en brix et disons qu’un taux de 18 est un très bon taux. Nous sommes alors entre février et juin.
Cette canne sera récoltée manuellement ou de manière mécanique. Dans le premier cas elle sera transportée entière à la distillerie, dans le second, la machine va directement la débiter en tronçons de 20 cm et la débarrasser du feuillage. La tige sera coupée au plus près du sol, puisque c’est dans le bas de celle-ci que la concentration en sucre est la plus importante.
Vezou ou mélasse :
Cette distinction tiendra à l’usage premier réservé à la canne. Si aujourd’hui les amateurs sont relativement divisés sur ces deux types de produits, il ne s’agira pas de définir l’un comme étant meilleur que l’autre, mais bien de les classer selon une méthode, voir une législation très stricte dans le cas du rhum agricole. Que nous le voulions ou pas, le premier rhum produit, fut celui de mélasse, l’utilisation de l’expression ‘traditionnel’ étant probablement ce qui fâche un peu les producteurs de la Martinique.
Je dirais à cela que l’éducation au rhum est en plein développement et si tous les producteurs mettent en avant une diversité de spiritueux, c’est tout d’abord que la question du goût le justifie, sans que cela n’ait besoin d’être discuté. Ensuite le monde des consommateurs restera toujours divisé entre ceux qui le consomme juste par plaisir et ceux qui ajoutent à cela le besoin d’en savoir plus, à nous de tenter d’agrandir au maximum la seconde catégorie.
Broyage et Fermentation :
Arrivée à la distillerie, il va y avoir un premier traitement de lavage. Ensuite les cannes seront envoyées dans un broyeur, ou plutôt une série de broyeurs. Afin d’en obtenir plus de matière, lors de cette phase, elles seront arrosées. Le liquide ainsi obtenu portera désormais le nom de vesou et représente environ 90% du jus contenu dans la canne.
Quant aux résidus, appelés bagasses, ils ne sont pas jetés. Ils seront utilisés comme matière première en tant que combustible. Ils serviront à faire chauffer l’alambic et même produire l’électricité nécessaire à toutes les installations.
Pour ce qui est de la phase de fermentation et bien elle se produit naturellement par l’ajout de levures. Ce qui aura pour effet de produire de la chaleur, une chaleur qui ne devra pas dépasser les 35°c à 38,5°c. Il y aura également du carbone et surtout de l’alcool.
La durée de cette étape dans le cas des AOC ne devra pas dépasser les 120 heures, dans des cuves qui en vue d’obtenir cette appellation toujours, ne devront pas dépasser les 50.000 litres.
Les levures seront bien souvent cultivées, le genre Saccharomyces revenant souvent. Toutefois, celles-ci pourront provenir du milieu naturel et provoquer une fermentation dite naturelle, ou par ensemencement via une cuve mère dont le contenu sera intégré aux autres cuves. Des acidifiants ou autres antimousse pourront se retrouver dans les cuves, ce que ne fait pas Longueteau en Guadeloupe par exemple.
Au terme de cette phase nous aurons un vin de canne, dont la concentration en alcool sera de l’ordre de 5%. Cette concentration peut être plus élevée, mais n’excèdera jamais 15%, puisqu’à partir de là, l’environnement devient hostile pour les levures.
AOC max : 7,5%.
Lorsque la base est la mélasse…
La mélasse est un genre de sirop épais et presque noir. Il se décline parfois en miel de canne lorsqu’il est le fruit d’une chauffe lente du jus de canne qui dure trois jours.
Cette substance est obtenue après cristallisation du sucre de canne. Le jus est en réalité chauffé jusqu’à ébullition, ce qui a pour effet de concentrer le sucre. Une fois cristallisé, ce sucre va être séparer de la mélasse par un passage dans une centrifugeuse.
Bien qu’elle ne soit plus cristallisable, la mélasse contient encore environ 50% de sucre. Elle sera donc diluée avec de l’eau et placée en fermentation durant deux ou trois jours en moyenne. Encore une fois, certaines distilleries en Jamaïque par exemple procèdent à une fermentation bien plus longue. A la fin de ce processus, nous obtenons un liquide, aussi appelé vin, qui concentre environ 8% d’alcool. Ce type de rum représente environ 90% du marché actuel.
Distillation :
Les premières réalisations se font sur des alambics rudimentaires, puis de type charentais. Mais c’est bien la colonne qui va propulser le rhum dans la production à grande échelle.
Quel que soit le modèle, il se compose en général d’une chaudière, un condenseur et un col de cygne. Il va permettre la séparation de l’eau et de l’alcool qui fort heureusement s’évapore à partir de 78,4°c. L’avantage d’une colonne étant qu’elle peut être rechargée en continu.
Dans le cas du Pot Still, il faudra recharger l’alambic entre chaque distillation et procéder à une double distillation afin d’obtenir un tel volume d’alcool. La colonne est d’un point de vue productif beaucoup plus rentable.
A la sortie de cet alambic nous avons un rhum blanc qui avant d’être commercialisé devra passer au moins trois mois en cuve inox au minimum ou maximum trois mois s’il passe dans des fûts de chêne, afin de ne pas emprunter sa coloration au bois. Un rhum blanc est traditionnellement consommé à un volume de 50% ou 55%, ce qui nécessitera un coupage à l’eau de source.
La Jamaïque fera à nouveau figure d’exception, puisque le rum blanc sera plutôt apprécié à des volumes d’alcool bien plus élevés, dits overproof.
Vieillissement :
Disons plutôt vieillissement ou pas !
Le rhum est l’un de ces spiritueux qui se consomme en effet largement non vieilli, c’est-à-dire blanc, pur ou sous forme de cocktails, ti-punch et autres. Il fait partie de ces spiritueux historiquement employés par les bartenders, qui de générations en générations parviennent à le ré-inventer avec beaucoup d’ingéniosité.
Les fûts utilisés pour le vieillissement sont comme pour le whisky, bien souvent d’anciens fûts de bourbon. Pour obtenir un rhum paille ou ambré, il fera un séjour d’au moins un an dans ces fûts.
Avant d’obtenir l’appellation rhum vieux il y passera au minimum trois ans.
Toujours dans le cadre de l’AOC, le volume des fûts ne devra pas excéder 650 litres.
Il est à noter que sous les tropiques, la part des anges s’élève à environ 8% par an. De nombreux rums, font donc une partie de leur maturation sur le vieux continent en complément d’une première phase tropicale. Pour exemple, une version de Caroni 23Y indiquait une part des anges estimée à 85% du volume initial, au terme d’une maturation intégralement tropicale.
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